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Saint Pierre et Saint Paul

                 La communauté chrétienne de Rome qui a été fondée par un chrétien inconnu, une dizaine d’années après la Pentecôte de Jérusalem a accueilli parmi elles de grandes figures de l’Église primitive : Pierre y arrive au début des années 50 et Marc le rejoint bien vite et Paul en 60 avec Luc. Leur apostolat a été si important que les chrétiens ont vu en eux leurs fondateurs.

                 En réalité, Paul a eu à Rome un apostolat certes fécond mais modeste, en particulier en raison de sa situation en résidence surveillée pendant plusieurs mois, à son arrivée. Bien sûr Paul y est mort martyr décapité sur la via Appia en 67.

 

                 L’impact de l’oeuvre de Paul est surtout sur l’Église en Asie Mineure – Turquie actuelle – mais surtout sur l’Europe, - le grand projet de Paul qu’il a mûri à Ephèse - à commencer par la Grèce et en Italie… peut-être aussi en Espagne.

                 Voyons quelques aspects spécifiques à l’apostolat de Paul et à la manière avec laquelle il créé et organisé l’Eglise. J’en ai retenu 4 pour cette homélie :

         Le 1er apport de Paul à l’Église est le le suivant : il implanta des communautés chrétiennes dans les pôles de l’Empire et particulièrement en Europe, mais surtout, en même temps, « il les structura en pensant déjà l’Église dans son universalité.

 

         Le 2ème apport : en prise sur les réalités concrètes de son temps, Paul fut l’initiateur d’une cité nouvelle et d’une nouvelle anthropologie, en repensant les relations entre les hommes à la lumière de l’Evangile et de son union mystique avec le Christ. »[1] Nous en vivons encore, même si en France, on cherche à déconstruire cet héritage.

 

         3ème apport de Paul est le suivant : Paul parle très peu de lui-même  dans une société romaine qui est une société du paraître, « où l’on existait qu’à travers la reconnaissance sociale, matérialisée par des honneurs et des distinctions... et où de plus en plus, on cherchait des « hommes divins » - ce que nous appellerions aujourd’hui des « hommes charismatiques » ou des « gourous »… d’emblée Paul se démarque du monde sans s’y sentir étranger pour autant !...Cet homme extraordinaire comprit plus vite que d’autres les aspirations et les potentialités du monde nouveau dans lequel il vivait : en effet, l’établissement Empire romain unifiait alors la terre habitée. Son histoire personnelle faisait de ce juif de la Diaspora hellénisée, citoyen romain de la 2ème génération de l’Empire, un PASSEUR DE CULTURE. »[2]

 

         Dernier apport paulinien : Paul a fondé des communautés sans communautarisme. 2 faits l’avaient alerté : l’affaire de Corinthe[3] montre que Paul a saisi très vite la tentation sectaire possible dans les communautés : « moi je suis pour Paul, moi pour Pierre, moi pour Apollos »…[4] Mais aussi le départ précipité de Thessalonique avait provoqué chez les chrétiens « le complexe de l’orphelin » : qu’est-ce qu’on va devenir maintenant que Paul n’est plus là ?

 

         MF Baslez note : Paul remédia à ces fragilités en organisant de véritables communautés, autonomes et viables, structurées par une mémoire commune et des liens personnels très forts ;  il fit le choix de les insérer dans la cité, sans rompre le solidarités naturelles et les réseaux où chacun évoluait mais en utilisant au contraire la structure même de la cité pour pénétrer par capillarité, en quelque sorte, dans le tissu urbain. »[5]

 

        

         Car pour Paul comme pour Aristote – l’a-t-il lu ? -, selon MF Baslez,  « la cité est conçue comme une imbrication de communautés depuis la communauté de base – la maisonnée (oïkos) – jusqu’à la communauté politique qui les assume tous. »[6]

         La maisonnée [7]: voilà la 1er organisation ecclésiale qui se construisit sur le modèle de la maisonnée et de l’association en conservant la même articulation à la cité. »

         Les chrétiens donc se rassemblaient habituellement chez un des chrétiens qui avait une grande maison. Il y a quelques mois avec quelques-uns d’entre vous, j’ai pu voir un de ce lieux de rassemblement chrétien : à Laodicée, nous avons vu ma grande maison d’un chrétien utilisée comme lieu de rassemblement de la communauté ; deux agrandissements ont été faits pour donner plus d’espace… puis, au début du 4è siècle, à la paix de l’Eglise,  de l’autre côté de la rue, on a construit une grande basilique chrétienne ;

         Et ces réunions dans la maison, sont ouvertes sur ceux de l’extérieur.[8] La communauté chrétienne ainsi ne se présentait pas d’abord comme « une organisation individualisée par son culte et par son dieu mais plutôt comme « un collège domestique ».[9] La loi romaine, en effet,  protégeait la maisonnée sous l’autorité du « pater familias » et ce qui s’y passait tant que cela ne troublait pas l’ordre public.  D’une certaine manière, cela protégeait aussi les chrétiens réunis dans la maison tant que le pater familias était d’accord. Le groupe pouvait s’agrandir par voisinage ou affinité et par patronage.

 

         De plus les communautés chrétiennes étaient ainsi bien insérées dans le réseau associatif. Ce fut le choix décisif de Paul qui, en même temps,  récuse tout communautarisme, en particulier la mise en commun des biens. Il invite les chrétiens à vivre « autour d’un idéal de fraternité élective[10]  dont le signe est la collecte libre entre communautés. Et Il écrit ses lettres en grec, la langue de tout le monde… « et il invite clairement les Corinthiens devenus chrétiens à travailler et à vivre normalement. »[11]

 

         Ainsi, très juif dans sa manière de voir l’homme, peu à peu, Paul élabore, en fait, « une nouvelle anthropologie chrétienne en s’appuyant directement sur  son expérience  de foi : c’est parce que le chrétien vit dans le  Christ, en imitant le Christ et en s’identifiant au Christ – et cela Paul le vit depuis sa conversion – qu’il peut trouver l’humanité dans son universalité, en plaçant la personne au coeur… par-delà tous les clivages statutaires de l’époque et en consacrant sa dignité inaliénable. »[12]

 

Conclusion:

 

         « La pensée de Paul, sa théologie, son engagement total au Christ qui l’avait appelé, ainsi que son art de la communication, en font un homme d’exception… Son héritage historique est considérable et mérite d’être réévalué… il ne voyagea pas pour voyager, mais en balayant le plus d’espace possible mais durablement ; il pensa le christianisme non plus comme une voie du judaïsme mais comme une communauté dans le cité, structurée, intégrée, en faisant des choix de société incontournables. »

 

[1]Idem p. 40

[2]Idem p. 41

[3]1Co.1/12, 3/4-5 et 22 . 1 thess. 2/7-9. p. 46-47

[4]1ere épitre aux Corinthiens 1 /10 à 17

[5]p. 47

[6]p. 47

[7]p. 47

[8]Voir 1 Co 5/15, 14/16 et 22-24

[9]Idem. Le collège, groupe partie prenante de la cité, dispose de lieux propres qui affichent son existence et sa raison d’être aux yeux de tous. Publications de l’Ecole Française de Rome.

[10]p.49

[11]p. 49

[12]p. 55

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