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32ème dimanche B

Nous voici aujourd’hui dans une situation bien paradoxale, manichéenne même :
D’un côté « beaucoup de riches » qui versent de grosses sommes d’argent dans le trésor du Temple, mais ne donnent qu’en « prenant sur leur superflu ».

Ont-ils oublié dans leur prière le psaume 48 qui pourtant les met bien en garde : « Pourquoi craindre aux jours de malheur (...), ceux qui s'appuient sur leur fortune et se vantent de leurs grandes richesses ? (...) L'homme comblé ne dure pas : il ressemble au bétail qu'on abat. » ?

Quoi qu’il en soit, le Christ n’est pas dupe, Lui qui connait le fond de nos cœurs. Jésus a si souvent mis ses disciples en garde contre la recherche des premières places, contre la vaine gloire que l'on retirait des longues prières ; il se fait maintenant le juge des offrandes que l'on apportait au temple. Montrant que Dieu ne juge pas sur le superflu mais sur l’essentiel.

 

Essentiel qu’a donné de son côté « une pauvre veuve » au-dessous du seuil de pauvreté... se dépouillant de « tout ce qu’elle avait pour vivre ». Les deux petites pièces qui étaient sa fortune, n’étaient que quelques sous, symboles de son indigence. Récitait-elle dans son cœur le psaume 130 ? « Seigneur, je n'ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent. Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; *mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère. » La confiance en Dieu vaut plus que toute fortune.
Ainsi, tout comme le temps de Dieu n’est pas le temps des hommes, Dieu ne compte pas comme les hommes, ce qui l’importe c’est la façon dont on donne, dont on se donne. D’ailleurs, ce geste de dépouillement total de la veuve du Temple vient rejoindre le geste d’une autre veuve qui vivait en pays païen, à Sarepta, comme nous le rapporte le livre des Rois, et qui, malgré son dénuement, a nourri et accueilli le prophète Élie. Elle a, elle aussi, tout donné : « Je rentre préparer pour moi et pour mon fils ce qui nous reste. Nous le mangerons et puis nous mourrons ». On reconnait bien ici l’hospitalité orientale dont nous devrions bien nous inspirer...

La première mérita l’éloge de Jésus : « Cette veuve a mis dans le trésor plus que tous les autres » et, pour la seconde, le prophète opéra un miracle : « la jarre de farine ne s'épuisa pas, et le vase d'huile ne se vida pas », deux miracles même, puisque le Prophète Elie ressuscitera le fils de la veuve. Elles ont tout donné, Dieu les a récompensées ayant trouvé en elles les âmes disponibles et confiante en son amour...

Belle illustration des versets du Magnificat chanté par Marie : « Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides. » (Luc 1, 52-53)
Dieu reçoit nos offrandes en les mesurant par la grandeur de la générosité que l'on a dans le cœur et non pas par la grandeur du don. Une obole venant de la pauvreté vaudra plus qu'une grosse somme d'argent venant d'une grande fortune. Dieu ne regardera pas ce que l'on donne, mais ce que l'on se réserve, ce que l’on garde jalousement pour soi, sans penser que tout vient de Lui : « il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons ; et un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout vient et par qui nous vivons. » (1Co8-6)

Cependant, en louant l’attitude de la veuve, Jésus ne critique pas les deux mondes qui se font face. Il cherche plutôt à attirer notre attention sur une attitude fondamentale qui doit caractériser le disciple.
•    D’un côté, le monde des apparences où chacun se soucie de ce que l’autre va penser de lui, de ses actions ou de ses choix. Le disciple s’occupe finalement plus de lui-même que de Dieu.
•    De l’autre, le monde du secret et de l’intériorité où le choix et l’action de chacun demeurent cachés de tous et connus de Dieu seul. Dieu ne regardera pas ce qu'on donne, mais avec quel cœur on le donne, il ne regarde pas ce que l’on fait pour notre prochain, mais l’amour avec lequel nous le faisons...

L’évangile du mercredi des cendres qui introduit carême et dans lequel les attitudes extérieures ostentatoires sont opposées au secret de nos cœurs et de nos vies le rappelle également : « ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra » (Mat 6)

Cet antagonisme relève en quelque sorte d’un combat spirituel sans cesse réactivé en nous. Pour se présenter devant Dieu, point besoin de rechercher à avoir les mains pleines de bonnes actions ou d’œuvres merveilleuses, il s’agit au contraire de les offrir sans peur et sans crainte qu’elles soient ou non à la hauteur de la grâce qui sera donnée. Ce n’est donc pas de générosité qu’il est question dans la parabole. La veuve aurait pu garder un peu pour vivre et personne ne le lui aurait reproché. Mais ce qu’elle fait dépasse le calcul et les prévisions : rien n’est trop beau pour Dieu, même le plus infime d’une existence humaine. Apparaît ainsi ce qui déborde de l’obole de la veuve et qui compte aux yeux de Dieu : ce n’est pas tant ce que nous avons, mais ce qu’Il est pour nous et ce que nous sommes capables de faire pour Lui sans retenue !

Or nous sommes la main charitable du Seigneur par qui toutes ces actions doivent passer. Chers frères et sœurs, qu’attendons-nous encore pour nous donner entièrement à cette belle mission du don total ? Peut-être plus de foi et de confiance entre notre Sauveur ?
Alors si nous vacillons face à l’abandon de nos vies à l’amour infini, reprenons dans nos cœurs l’antienne de ce jour : « Dieu de puissance et de miséricorde, éloigne de nous, dans ta bonté, tout ce qui nous arrête, afin que sans aucune entrave, ni d’esprit ni de corps, nous accomplissions d’un cœur libre ce qui vient de toi. ».

Amen

Jean-Marie Blondel, diacre

Commentaires

  • Merci Jean -Marie de nous éclairer encore par ton homélie sur le sens du don.
    Donner de son essentiel engage davantage ,
    Donner de son essentiel avec amour et dans le secret,
    En redant amour pour amour à Celui qui nous a créés le premier,demande un abandon plus radical à son amour infini.
    Cela m'amène à penser aux prëtres ,diacres et consacré(e)s
    qui ont livré toute leur vie et leur personne au Christ...et à tous les baptisés qui dans leur sacerdoce commun ,sont configurés au Christ prêtre,prophète et roi...

    ...................................
    Seigneur,"éloigne de nous ce qui nous arrête,afin que nous accomplissions d'un coeur libre ,ce qui vient de toi!" amen!

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