Fête du Saint Sacrement, homélie de samedi
Nous voici donc réunis aujourd’hui pour célébrer la solennité du Saint Sacrement, Saint Sacrement constitué par le corps et le sang de notre Seigneur Jésus. Saint Sacrement don suprême de la présence réelle, vivifiante, nourrissante, du Christ en nos communautés, en nos églises, en nos villes, en nos humbles personnes. Et pour soutenir notre méditation il nous a été donné d’écouter fort judicieusement Saint Paul qui nous a rappelé le récit de l’institution durant lequel Jésus a célébré la première eucharistie. Moment d’intense tension qui précède le sacrifice suprême de Jésus. Moment d’amour suprême où Jésus se donne en abondance pour chacun de nous et pour l’éternité !
En parallèle, le récit de la multiplication des pains préfigure toute l’abondance de ce don qui vient, aujourd’hui encore, nourrir nos corps, nos cœurs, nos vies, nos âmes. Précédant le don de l’Esprit qui met nos cœurs à l’unisson des battements du cœur de Dieu, l’Eucharistie vient faire habiter le Christ en nos corps et Le rendre réellement présent dans le monde.
Et, comme le disait Saint Bède le Vénérable, si « c’est au soir que Jésus nourrit cette foule : c'est au soir de sa vie qu'il nous donnera la nourriture de nos âmes, et il continuera encore à nous la donner au déclin du siècle » (saint Bède le Vénérable : commentaire de l’évangile selon saint Marc).
L'Eucharistie est notre Mémoire vivante ! L'Eucharistie, comme le rappelle le Concile, "contient tout le trésor spirituel de l'Eglise, c'est-à-dire le Christ lui-même, lui notre Pâque, lui le pain vivant, lui dont la chair, vivifiée par l'Esprit Saint et vivifiante, donne la vie aux hommes, les invitant et les conduisant à offrir, en union avec lui, leur propre vie, leur travail, toute la création" (Presbyterorum ordinis, n. 5).
Loin d’être un symbole, Elle est, pour nous chrétiens, cette présence réelle vivante et vivifiante qui nous habite lorsque nous allons communier et qui nous accompagne lorsque nous la vénérons. Avons-nous conscience de cet extraordinaire miracle chers frères et soeurs en Jésus Christ ? Le christ est là, réellement, au milieu de nous, dans le silence des tabernacles des églises, présent au milieu de nos villes, n’attendant que notre visite pour un cœur à cœur intime avec nous au travers de la prière. Mais surtout, le Christ vient nous visiter lorsque nous célébrons l’Eucharistie. Il viendra parmi nous dans quelques instants. Et lorsque nous le recevrons au travers de la communion nous allons le toucher de nos mains qui se tendront pour le recevoir et Il viendra nourrir nos corps de sa divinité ! Quel extraordinaire mystère, quelle extraordinaire rencontre !
Nous vivons alors ce que saint Jean annonce avec tant de joie dans sa première épitre : « CE QUI ETAIT depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. ». Il nous renvoie ainsi vers notre vocation de Chrétiens : Car nous aussi nous entendons le Christ lorsque nous lisons les Ecritures, nous voyons, nous contemplons le Christ lorsque nous l’adorons, et nous le touchons, oui, nous le touchons ! Lorsque nous le recevons dans nos pauvres mains au moment de la communion ! Oui, nous allons, nous aussi, jusqu’à toucher le verbe de vie qui nous donne sa vie, qui vient habiter nos vies au travers de son eucharistie « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. » disait Jésus à ses apôtres (Jn 6,56)
C’est pourquoi, le geste que nous posons en allant communier lors de la messe est un geste profondément engageant qui nous ouvre à la communion, c'est-à-dire à l’accord parfait avec le Christ. En recevant dans notre bouche le corps et le sang du Christ et par là même en l’assimilant dans notre organisme, nous intégrons dans notre propre corps la propre essence du Christ. Nous devenons ainsi des Théophores c’est à dire des porteurs de Dieu.
Le prêtre et poète orthodoxe Virgil Giorgiu ne s’y trompait pas quand il racontait, dans son livre « de la 25ème heure à l’heure éternelle », la transformation des paroissiens de son village qu’il constatait à l’issue de la Divine Liturgie : « Tout le monde, semblait transfiguré, dépouillé de toute préoccupation terrestre, sanctifié. Et plus que sanctifié : déifié… En sortant de la Divine Liturgie, tous les hommes et toutes les femmes de notre village étaient des Théophores… Tous avaient communié. Et dans leurs veines coulait le Sang de Dieu » et de poursuivre « Dieu était entré sous le toit de chaque âme chez les gens de mon village. Lorsque l’on porte en soi Dieu, qui est la lumière des lumières, on est illuminé, du dedans, de telle manière que toute la chair et tout le corps sont transfigurés. »
Voilà comment Dieu agit dans la présence Eucharistique. Au travers de rien de plus dépouillé et de plus simple qu’un peu de pain et quelques gouttes de vin, Dieu se fait présence réelle et vient habiter en nous pour nous transfigurer et nous mettre au service de Dieu.
« Donnez-leur vous-mêmes à manger. » ordonnait Jésus à ses apôtres. Sans ses apôtres aurait-il pu opérer ce miracle ? Certainement car rien n’est impossible à Dieu. Mais en impliquant ses proches dans la réalisation de son miracle il montre combien l’homme au cœur disponible peut être acteur de l’amour de Dieu dans le monde. Avec cinq poissons et deux pains, jésus a nourri la foule en abondance. Avec nos bonnes volontés, Jésus peut faire tant miracles.
Frères et sœurs, laissons-le habiter nos vies, laissons-le nous inviter à son sevice, laissons-le nous faire agir pour tant de joie !
Jean-Marie Blondel, diacre