Mère de Dieu
sermon du 1er janvier 2020
Tout bon diocésain de Nancy et Toul connaît bien ce titre de « Théotokos », ou de Mère de Dieu, attribué à la Vierge Marie.
Il se trouve en effet, écrit en lettres d’or sur une plaque de marbre noir au fond du chœur de la cathédrale de Toul. Cette inscription rappelle la fondation de la 1ère cathédrale de Toul « intra muros » dans la mouvance de la proclamation du Concile d’Ephèse en 431.
L’expression était apparue pour la 1ère fois sous la plume du patriarche d’Alexandrie (250-313-328), Alexandre en 325, l'année du Premier concile de Nicée.
« Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, vrai Dieu né du vrai Dieu, par l'Esprit Saint a pris chair de la Vierge Marie et s'est fait homme » : c'est en ces termes que s’exprime le symbole de foi énoncé par le concile de Constantinople, en 381 précisant et complétant celui de Nicée.
Du coup, le peuple chrétien avait pris l'habitude de donner à Marie le titre de « Mère de Dieu », ce qui allait faire naître une polémique qui secoua toute l’Eglise d’Orient.
Car la pureté de la foi naît souvent dans les débats, les oppositions, les interventions du pouvoir politique, la compromission de certains,… bref le contraire de ce qu’on attendrait ! Mais on voit que l’Esprit Saint conduit l’Eglise puisque la vérité jaillit du fracas de oppositions et de cris !
En effet, le patriarche de Constantinople, Nestorius, lui, soulignait la distinction entre la divinité et l'humanité en Jésus. Il partit en guerre contre ce titre de « Mère de Dieu » donné à Marie, ce qui lui apparaissait comme une nouvelle hérésie : « Je refuse de voir un Dieu formé dans le sein d'une femme ! »
Pour lui, Marie est la mère de l'homme Jésus, non du Verbe éternel.
Cette querelle est grave car elle touche à la personne même de Jésus Christ Messie : si l’humanité est séparée de la divinité dans le Christ, il y a deux « personnes » en Christ ! Cela n’a aucun sens ! Et nous ne sommes pas sauvés : car ce qui nous sauve c’est la communion de Dieu et de l’homme réalisée dans l’unique personne de Jésus de Nazareth. Refuser le titre de Théotokos à Marie reviendrait donc à séparer la divinité de l'humanité de Jésus, ou à admettre que la divinité de Jésus est postérieure à sa conception, ce qui rejoindrait alors l'hérésie arienne ou celle des partisans de l'adoptianisme alors que le symbole de Nicée/Constantinople avait affirmé la parfaite union (la consubstantialité) de la divinité et de l’humanité dans l’unique personne du Christ. La controverse est donc importante et délicate.
Deux camps s'opposent donc, celui des partisans du titre de Théotokos (Mère de Dieu) et celui des partisans d'Anthropotokos (mère de l'Homme). Un moment, Nestorius proposera le titre de Christotokos (Mère du Christ) afin de concilier les deux camps et résoudre une querelle qui agitait violemment son Église.
Mais ses attaques contre le titre de « Mère de Dieu » trouvent en Saint Cyrille, évêque d'Alexandrie, le grand défenseur de l'unité du Christ Dieu et homme, en une seule personne.
Ce qui est en jeu, ce n'est pas d’abord le statut de Marie, mais la réalité de l'Incarnation : Jésus fils de Marie est-il vraiment Dieu ? Si oui, sa mère peut véritablement être dite Mère de Dieu. Cyrille se dépense sans compter. Après bien des péripéties, des échanges de lettres et de mémoires théologiques, l’empereur Théodose II convoque unconcile: il a lieu à la Pentecôte le 7 juin 431, à Éphèse, ville mariale par excellence :c'est là en effet, à côté d’Ephèse, que Marie a résidé un certain nombre d’années, avec Jean, après la Pentecôte sans que l’on sache exactement quand.
St Cyrille d’Alexandrie préside le concile : les évêques arrivent au compte goutte en raison du mauvais temps ! Ceux qui sont arrivés (198) expriment la foi de l’Eglise en la maternité divine de Marie, réaffirmant en même temps le dogme de Nicée (325) et de Constantinople (381). Ils condamnent et déposent Nestorius.
Quand les retardataires, favorables à Nestorius – arrivent (ils sont 27), ils organisent un « contre concile » qui déposent Cyrille. Théodose II annule les décisions du Concile légitime !
Quand les délégués du pape, arrivent seulement le 10 juillet, au nom de Célestin 1er, lls confirment les décisions du Concile présidé par Cyrille et le rétablissent dans sa charge et déposent tous les opposants partisans de Nestorius, en particulier le meneur du « contre concile », Jean d’Antioche.
Le Pape ratifiera ces décisions en 432.
Un moment, la décision entraîna la brouille entre Antioche et Alexandrie avant une réconciliation. En revanche, l’Eglise de Perse (syriaque), l’Eglise de l’Orient, absente du Concile et soucieuse d’échapper au contrôle de Byzance, refusa la décision et se sépara des autres Eglises, dont Rome : on les appela « nestoriens » dont une partie se rallia à Rome en 1551. Depuis, une meilleure compréhension réciproque a permis un réel rapprochement.
Nous pouvons remarquer que l’Eglise ne nous fait pas prier la Vierge avec n’importe quel texte ! L’Ave Maria est composé dans sa première partie, des mots de l’Ange à Marie et de ceux de la salutation d’Elisabeth à la Visitation.
La seconde partie de l’Ave Maria, elle, qui commence par « sainte Marie Mère de Dieu », s’appuie donc sur le concile d’Ephèse et la fête d’aujourd’hui. Non, on ne prie pas avec n’importe quels mots et la prière est l’expression de la foi véritable. Amen
MAGNIFIE, Ô MON ÂME, LA MÈRE DE DIEU,
PLUS VÉNÉRABLE ET GLORIEUSE QUE TOUS LES ANGES DANS LE CIEL !
- Je vois un mystère étonnant, qui dépasse l’entendement :
Une grotte est devenue le ciel, et la Vierge remplace le trône des chérubins.
- La crèche est la demeure où repose Celui que l’Univers entier ne pouvait contenir,
le Christ notre Dieu, dont nous chantons et célébrons la Gloire.