6ème dimanche C
Frères et sœurs,
regardons d’abord la magnifique scène que nous décrit St Luc aujourd’hui.
Jésus descend de la montagne, entouré des Douze et de disciples. Et il va à la rencontre d‘une foule qui vient vers lui, « une grande foule de peuples de toute la Judée et de Jérusalem et de la côte de Tyr et de Sidon ». Et la rencontre se fait, physique même « et toute cette foule cherchait à le toucher car il sortait de lui une force qui les guérissait tous. »!
D’un côté donc Jésus, entouré des Douze apôtres qu’il vient d’instituer sur la montagne après une nuit de prière - c’est le récit des versets précédents - et de l’autre une foule de juifs et de païens - le littoral de Tyr et de Sidon - : tous venus pour l’entendre et le toucher, pour être guéris. Jésus évangélise cette foule si bien que dans les Actes des Apôtres, jamais St Luc ne mentionnera le littoral de Tyr et de Sidon comme un terrain de mission: les communautés chrétiennes qui existaient dans ces régions sont rattachées par St Luc, directement à Jésus. C’est la réalisation de prophéties: les nations se joignent au peuple d ‘Israël pour recevoir le salut de l’Envoyé divin.
Et Jésus entouré des nouveaux « Pères du peuple nouveau » que sont les Douze apôtres, Jésus enseigne comme un prophète, avec vigueur. En effet, les béatitudes que nous rapporte St Luc, sont bien plus proches qu’on ne pense à première vue des béatitudes que nous trouvons dans l’Evangile de St Matthieu, mais elles sont plus courtes et surtout plus percutantes: le style en est plus prophétique. Il y a comme deux strophes qui se répondent: les béatitudes et les plaintes, « heureux » « malheureux. ».
Jésus, avant de parler, lève les yeux sur ses disciples, il les embrasse du regard: il les voit pauvres : ne nous trompons pas sur la « pauvreté » dans la Bible : ce n’est pas la misère, c’est la condition spirituelle de croyants qui n’attendent leur bonheur que de Dieu, certains par expérience que rien ne comble hors la communion avec Dieu. Ils se contentent de peu, d’une vie simple et sobre, affamés de la Parole de Dieu, affamés d’attention, d’affection et d’apaisement de la part de Dieu. Parmi ces pauvres qui sont là devant la Christ, il en voit certains qui pleurent, surtout affligés de maladie ou de malheurs ou certains, prisonniers d’esprits impurs.
St Paul, contemplant un jour, la communauté de Corinthe qu’il a sous les yeux, s’écriera comme Jésus: « il n’y a pas beaucoup parmi vous de sages selon le monde, pas beaucoup de puissants, pas beaucoup de gens bien nés. Mais ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre les forts ».
Et Jésus exultera dans l’Esprit Saint: « je te bénis Père d’avoir caché cela aux sages et aux savants de l’avoir révélé aux tout petits. »
Jésus voit donc parmi ses disciples et la foule qui est là devant, beaucoup de gens pauvres dans leur cœur, des petits, et certains accablés de malheurs.
Et il se réjouit parce qu’il sont venus à lui avec leur pauvreté et qu’il va les faire riches de sa Parole, de sa grâce, de son salut: « Le royaume de Dieu EST à vous, là dès maintenant, vous serez rassasiés, consolés... » Cela rappelle le psaume 125 « Quand le Seigneur ramena nos captifs à Sion, nous étions comme en rêve: notre bouche était pleine de rire et nos lèvres de chansons ».
Evidemment, pour comprendre ce texte, il faut avoir si je puis dire la hiérarchie des valeurs de la Bible et de l’enseignement de l’Evangile: connaître Jésus, être rassasiés par sa Parole et de la vision de sa gloire, goûter la consolation intime de sa présence priment sur la possession des biens de la terre, de la possession de la puissance et de la notoriété sociale.
Les pauvres sont tout près de Jésus, de son esprit, parce qu’ils ont la même hiérarchie de valeurs que lui; les riches sont malheureux parce qu’ils attachent de l’importance à ce qui justement, aux yeux de Jésus, n’en a pas ! Et du coup, ils ne peuvent et ne veulent venir à Lui pour y trouver leur béatitude : ils la cherchent ailleurs et trouveront une illusion. Rien dans ce monde déchu ne peut s’accomplir pleinement et si les rêves ou les utopies humaines se réalisaient, on le saurait !
Venir à Jésus et trouver tout en lui, est même si important qu’il faut accepter de perdre éventuellement sa réputation pour venir à Lui: « heureux êtes-vous si les hommes vous haïssent, bous bannissent et vous insultent à cause de moi. ».
Frères et soeurs, laissons cet enseignement rude et roboratif nous façonner ce matin. Allons jusqu’au bout de notre démarche: en venant à la messe, nous sommes comme ces foules venues à Jésus; que cette heure passée en compagnie du Maître et dans l’intimité de sa communion, irradie toute notre vie; qu’elle soit vraiment le centre de notre vie, notre bien le plus précieux; que Jésus devienne notre attachement premier, si fort que nous acceptions par avance les moqueries dont on peut aujourd’hui entourer les chrétiens.... car l’enseignement de Jésus prend à rebours, avec force, les espérances d’un monde riche, sûr de lui, et arrogant, se prétendant évolué, moderne, libéré... sans père ni maître.
Le bannissement et l’insulte évoqués dans la plaine paisible du mont Thabor, seront violents bientôt à Jérusalem pour le Christ et les Douze; ils se reproduiront souvent au cours de l’histoire, tant l’Evangile prend à contre courant les idées des hommes, comme on le voyait déjà dans l’ Ancien Testament.
Mais apprenons de Jésus aujourd’hui dans l’Evangile que cela semble une condition normale de la vie chrétienne. Puissions-nous trouver en Lui notre joie et la force de lui rester fidèles. Amen.
Commentaires
Je m'imagine peut-être à tort, la population des territoires du littoral de Tyr et de Sidon accourant vers Celui dont on parle tant dans la région sans se poser trop la question:J'y vais ou pas?Je lui parle en me confiant à lui ou pas ?je le touche ?vais à sa suite ?,me laisse pénétrer par son regard et fortifier par sa Parole?lui présente ou non mes plaies ,mes larmes intérieures et aussi mes joies ?
Seigneur !Donne moi ,avec toi ,plus de simplicité spirituelle en attendant tout de toi ,en faisant davantage de toi le centre de ma vie...Et, le Carême approchant ,la grâce d'une vie" simple et sobre."
Dans l'Écriture le monde est renversé.
"Les riches ont tout perdu ,
Ils cherchent du pain,
Les affamés se reposent."