Jour de Pâques 2022
« Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés et si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir dans le Christ, nous sommes les plus malheureux des hommes » écrit aux Corinthiens St Paul effaré de leur doute sur la résurrection de Jésus. Et nous entendons St Pierre marteler avec audace aux habitants de Jérusalem dans les tout premiers temps de l’Eglise : « Ce Jésus que vous, vous avez crucifié, Dieu l’a ressuscité des morts, nous en sommes témoins. » Et même le procurateur Festus avait compris la spécificité du témoignage chrétien quand il résumait ainsi les démêlés de St Paul avec les autorités juives : « Ils avaient seulement avec lui je ne sais quelles contestations touchant un certain Jésus qui est mort et que Paul affirme être vivant. » On comprend que St Augustin ait pu dire dans un raccourci saisissant : « La Foi des Chrétiens est la Résurrection du Christ ».
La Résurrection du Christ : un événement, arrivée à une personne… pas un symbole comme le retour annuel du printemps, une image, une théorie, non ! un fait.
Un fait constaté par des premiers témoins qui n’avaient aucune foi préalable à cet événement et qui n’attendait rien après la mort. Ainsi, lorsque Jésus avait évoqué cet événement, en réclamant le silence sur la Transfiguration « jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité des morts », St Marc ajoute : « Ils gardèrent la recommandation tout en se demandant entre eux ce que signifiait « ressusciter d’entre les morts ». Et ce ne sont pas les allusions de Jésus au signe de Jonas qui les enseigneront davantage. La dernière chose à laquelle pouvait s’attendre un croyant au sujet du Messie, c’est qu’il souffre, meurt et ressuscite ! Pierre est un bon témoin quand il déclare à Jésus : « cela ne t’arrivera pas ! » Et même si dans les courants pharisiens, on parle d’une résurrection, c’est à la fin des temps, pour tout le peuple, avec la Venue glorieuse du Messie. Comme le note le grand exégète Jérémias : « l’annonce chrétienne primitive à propos de la résurrection de Jésus, avec un intervalle de temps qui le sépare de la résurrection universelle de tous les morts, représente une nouveauté absolue pour le judaïsme. »
Les apôtres ont donc buté sur un fait, inattendu pour eux, mais incontournable.
Ce fait a deux faces : un tombeau vide du corps d’un côté et, de l’autre, des rencontres du Christ Vivant après sa mort. L’Eglise nous fait lire le jour de Pâques la découverte du tombeau ouvert et vide par les femmes puis par les apôtres Pierre et Jean. Curieusement dans la prédication des premiers chrétiens, cette découverte tient peu de place : les témoignages se concentrent davantage sur les rencontres avec le Christ Vivant. Mais en ce matin de Pâques, l’Eglise tient à nous faire entrer dans le tombeau avec les premiers témoins matinaux.
Avec St Jean, elle veut nous faire voir les linges abandonnés : tout est en place comme au soir du vendredi saint : le linceul est exactement à la même place, la mentonnière aussi et les trois bandelettes qui enserraient le corps aux pieds, au ventre et à la poitrine, sont en place. Le linceul est comme on l’avait disposé mais il est vide du corps : le linceul est « affaissé » comme dit le texte. Pour Jean, cette vision suffit : on n’a pas enlevé le corps du linceul – il serait déplacé, on n’a pas enlevé le Seigneur du tombeau – on aurait tout emporté… Le linceul s’est vidé de l’intérieur sans rien bouger… « Il vit et il crut. »
Cette découverte du tombeau au matin de Pâques est un événement historique qui ouvre l’esprit et le cœur de St Jean vers un autre événement – l’Evénement par excellence - qui dépasse l’histoire et qui ouvre l’histoire des hommes vers Dieu : la résurrection du Seigneur que personne n’a vue. La résurrection de Jésus brise la fermeture de la vie des hommes sur la vie de cette terre s’achevant dans la mort. C’est la mort de la mort.
Cette Résurrection ouvre une brèche, un Passage, une Sortie, une Délivrance : on comprend après coup, que Dieu nous l’ai déjà fait entrevoir en réalisant la sortie d’Egypte pour Israël que nous lisons hier soir ! St Luc a raison quand il nous dit que Jésus transfiguré parlait avec Moïse et Elie de « son Exode qui devait avoir lieu à Jérusalem. »
Soyons clair : Si Jésus n’est pas ressuscité, nous ne pouvons pas prier Jésus, nous pouvons évoquer sa mémoire, le prendre pour un maître pour cette vie, nous pouvons l’évoquer pas l’invoquer. S’il n’est pas ressuscité, ce sont donc les Chrétiens qui le font vivre et non lui qui les fait vivre et l’eucharistie n’est qu’un mime de souvenir dont on se lasse à la longue. Si Jésus n’est pas ressuscité, la mort n’est pas vaincue, la communion avec Dieu n’est pas vraiment établie car s’il y a un dieu, il est loin de la terre et laisse les hommes dans leur histoire.
On comprend l’effarement et l’indignation de St Paul devant le doute des Corinthiens : « La foi des Chrétiens est la résurrection de Jésus. » C’est l’Evénement et depuis les apôtres l’Eglise l’atteste en chaque eucharistie. Comme le dit St Augustin : « Il est ressuscité le troisième jour comme les apôtres avec leur sens aussi, l’ont vérifié. » Amen.