27ème dimanche C
« Lorsque je vais à Lourdes, il arrive que, lors de la procession eucharistique, on prenne des intercessions qui demandent au Seigneur la santé. Parmi celles-ci, des « Seigneur fais que je vois, que j’entende, que je marche », sont repris par la foule en prière et viennent souligner la soif de guérison qui anime les pèlerins présents et encore plus les pèlerins malades. Et, sans transition, à la suite de ces intercessions propres à la santé physique des personnes présentes, un « Seigneur fais que je crois » vient vibrer dans les sanctuaires. Demande qui place cette prière au même niveau que les soucis de santé, illustrant que la foi est la santé de l’âme et que manquer de foi rend l’homme souffrant de tant de maux qu’il est nécessaire qu’il guérisse de cette grave maladie spirituelle. Demande qui vient en écho de la requête des apôtres auprès du Christ aujourd’hui : « Augmente en nous la foi ! ». Demande qui recentre nos vies de chrétiens, sur l’essentiel : croire en la Parole de Dieu, avec toutes ses conséquences, croire au point même qu’elle nous habite et vient transformer nos vies en nous mettant humblement au service de la Parole et de nos frères.
Et Jésus de comparer la foi à un grain de moutarde pour exprimer sa faiblesse apparente et sa flamme intérieure qui se fait sentir au palais et aux entrailles de l’homme et qui nous pousse à faire de grandes choses : Ici, d’après Saint Luc, faire se déraciner un arbre pour qu’il se plante dans la mer. Chez Saint Marc (Mc 11, 22-25) en réponse à la même question Jésus dit « quiconque dira à cette montagne : “Enlève-toi de là, et va te jeter dans la mer”, s’il ne doute pas dans son cœur, mais s’il croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé ! ».
La foi décrite par Jésus peut donc faire déplacer les montagnes… Mais nous n’avons jamais vu de pareil… Combien de fois d’ailleurs ai-je rêvé de voir une petite montagne se déplacer quand j’étais en vacances en Haute-Savoie. Cette montagne cachait toute la vallée de Chamonix dont les aiguilles du midi, d’Argentière, verte (Ma préférée) et j’en passe. Sans elle nous aurions pu avoir une vue superbe sur l’ensemble du massif du Mont Blanc, merveille de la création de Dieu… Mais cette montagne n’a jamais bougé… Ma foi n’était pas assez grande. Le Seigneur le sait bien, il nous connait bien : « Avant même de te façonner dans le sein de ta mère, je te connaissais ; avant que tu viennes au jour » disait le Seigneur à Jérémie (Jer 1,5). Alors nous ne pouvons que jouer franc jeu avec Lui, il connait si bien nos limites. Et si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, nous connaissons si bien nos doutes et nos tiraillements entre bien et mal. C’est peut-être la prise de conscience qu’avaient faite les apôtres et qui a justifié leur requête : « Augmente en nous la foi ! ». Christ connaît nos limites mais il peut nous aider à les dépasser, si nous nous mettons à son école.
Et aujourd’hui il nous montre un chemin de foi qui passe par le service. Un chemin humble effacé, sans plan de carrière, au travers du service de sa Parole et de nos frères. Et ce service, il nous demande de le faire simplement, comme s’il était inutile, comme si nous étions inutiles. Laissant ainsi toute la place au Seigneur. Nous laissant contempler toute sa gloire. Nous faisant comprendre que plus nous nous effacerons, dans le service, plus Dieu pourra agir en nous. Alors, pourquoi s’enorgueillir de gestes d’amour qui nous sont dictés par l’Amour infini de Dieu Lui-même ? En effet, tout acte posé avec amour n’est que le fruit de l’amour de Dieu qui travaille nos âmes et nos êtres et c’est de Lui et Lui seul que nous tirons cet amour que ne peut que Lui revenir
Ainsi, si Jésus nous fait cette demande de nous considérer comme « simples serviteurs » ou « serviteurs inutiles » (Je préfère la seconde version…), c’est pour nous éviter de prendre la « grosse tête » lorsque nous agissons en son nom et que nous ne faisons que notre devoir.
Or s’il est question aujourd’hui d’arbres ou de montagne à transplanter dans la mer. Mission qui nous paraît impossible, il y a dans nos vies, bien des arbres ou des montagnes à transplanter au nom de Dieu et grâce à notre foi, des ténèbres du monde vers son océan d’amour : Montagnes d’indifférence de notre société, montagnes d’égoïsme qui nous menacent, montagnes d’individualisme, arbres de vies qui sont perdus dans le tohu-bohu du monde… Là, nous avons des actes forts à poser et un rôle important à jouer.
Vous allez me dire que nous n’avons tous les mêmes facilités pour agir, alors comment procéder ?
A cette question Sainte Teresa de Calcutta disait : « Sois toujours fidèle dans les petites choses, car en elles réside notre force. Pour Dieu, rien n'est petit. Il n'entend rien diminuer. Pour lui, toutes les choses sont infinies. Pratique la fidélité dans les choses les plus minimes, non pas pour leur vertu propre, mais en raison de cette grande chose qu'est la volonté de Dieu — et que, moi-même, je respecte infiniment. » et de poursuivre : « Ne recherche pas des actions spectaculaires. Nous devons délibérément renoncer à tout désir de contempler le fruit de notre labeur, accomplir seulement ce que nous pouvons, du mieux que nous le pouvons, et laisser le reste entre les mains de Dieu. Ce qui importe, c'est le don de toi-même, le degré d'amour que tu mets dans chacune de tes actions. » et de conclure : « Sois humble et rien ne te dérangera jamais. »
« Sois humble et rien ne te dérangera jamais. » C’est simple et lumineux !
Lorsque je lis le récit du Jugement dernier que Jésus fait dans l’évangile de Saint Matthieu (Mat 25,31-46), récit où « le Fils de l’homme viendra dans sa gloire » (…) et « séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des boucs », lorsque le Christ place à sa droite « les bénis de son cœur » à qui Il donne « en héritage le Royaume préparé pour eux depuis la fondation du monde. », parce qu’ils ont été attentifs à leur prochain, je suis toujours surpris par l’étonnement des justes : « Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu… ? tu avais donc faim, et nous t’avons nourri ? tu avais soif, et nous t’avons donné à boire ? » je suis toujours surpris par l’étonnement des justes car ils semblent ne pas s’être aperçu du bien qu’ils ont pu faire à leur prochain. Comme si ce qu’ils avaient fait coulait de source.
Je crois que nous avons là la meilleure des conclusions à cette homélie. Alors, frères et sœurs agissons avec amour dans la simplicité et l’humilité, nous serons les serviteurs dont le Christ a besoin.
Amen. Diacre Jean-Marie Blondel.