Vigile Pascale
St Paul déclare dans la 1ère épître aux Corinthiens : « Si le Christ n’est pas ressuscité, vide est notre message, vide votre foi. » (1 Co 15/14) à quoi St Augustin fait écho : « la foi des chrétiens, c’est la résurrection de Jésus. »
Et cette résurrection est pour nous, pour notre bien : « 20 Mais nous, nous avons notre citoyenneté dans les cieux, d’où nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ, 21 lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux, avec la puissance active qui le rend même capable de tout mettre sous son pouvoir. »
La résurrection, c’est donc la découverte du tombeau vide par les femmes et les apôtres, montrant que le corps de Jésus mort avait mystérieusement disparu sans rien bouger de son linceul, et les apparitions du Christ aux disciples avec pour conséquence, l’attente pour nous de notre propre résurrection car c’est encore St Paul qui le dit : « Mais non ! le Christ est ressuscité d’entre les morts, lui, premier ressuscité parmi ceux qui se sont endormis. »
« Le témoin muet si éloquent » comme disait St Jean Paul II, de cette résurrection, est le linceul : à sa place, sans avoir été bougé, vide, « les linges à plat » dit St Jean, c’est-à-dire la partie du linceul qui était sur le corps est tombée sur la partie du linceul qui était sous le dos.
Et puis une image sur le linge dont on ne sait toujours pas comment elle a pu être faite…. Et une image non pas d’une homme vivant, mais d’un homme figé dans la rigidité cadavérique, avec les yeux fermés, sans absolument aucun signe de décompositon.
Et puis un linceul qui n’a pas été enlevé par celui qui en est sorti : aucune trace d’arrachement sur les nombreux caillots de sang ou les fibres de lin.
Paul Claudel contemplant le linceul en 1935, disait : « Voilà qu’après les siècles écoulés, l’image oblitérée reparaît tout à coup sur le tissu avec une véracité épouvantable, avec l’authenticité non plus seulement d’un document qu’on ne peut récuser mais d’un fait actuel. L’intervalle des 19 siècles est anéanti d’un coup, le passé est transféré dans l’immédiat… Plus qu’une image, une présence.»
Cette approche de Claudel est belle et renversante…
Mais elle doit céder devant la puissance de l’eucharistie qui est présence sans image du Christ Ressuscité mais totalement efficace pour la résurrection des disciples du Christ. Dans le récit des pèlerins d’Emmaüs, quand Jésus accomplit les gestes du repas de la Cène, il disparaît du regard des deux pèlerins ! Il est tellement présent dans le Pain qu’il ne peut pas être visible à côté… cela ferait deux présences !
Seule l’Eucharistie nous donne le Christ Ressuscité, aussi vivant et autant lui-même qu’il se montra vivant aux apôtres après sa résurrection.
Aussi vivant mais plus intérieur à nous qu’aux apôtres ! Quand nous recevons l’eucharistie comme ce soir – et pour la 1ère fois pour quelques-uns d’entre nous – nous consommons Jésus mais c’est lui qui nous assimile à Lui : nous devenons Christ, tout notre être humain – coeur, esprit, chair, action, volonté, pensée – tout notre être est transformé en Christ, un au Christ et aux frères qui ont communié comme moi d’une manière inséparable. C’est ainsi que chaque dimanche ou chaque jour pour certains d’entre nous, s’accomplit la Résurrection, se raffermit notre amitié avec le Christ et avec les frères, ainsi que s’accomplit en nous la Pâque du Christ.
L’autre Don que fait le Ressuscité à ses disciples dans l’Eucharistie – c’est-à-dire à nous aussi – c’est le Souffle de son Esprit Saint. Dieu introduit dans sa Création la nouveauté absolue de son action : « Voici que je fais toutes choses nouvelles » dit Dieu dans l’Apocalypse.
Dieu en effet transforme la situation de l’homme d’une manière absolue : l’histoire humaine contient maintenant la Présence de Dieu, elle n’est plus une suite d’événements qui se déroulent sous le regard de Dieu, … l est totalement impliqué, corps et âme si on ose dire pour Dieu ! par l’Incarnation, la Résurrection et l’envoi du St Esprit : cette action divine introduit, dans un monde vieilli, la fraîcheur primordiale car cette nouveauté, c’est celle du siècle à venir ! Et cette fraîcheur première du siècle à venir refait le présent, le passé et l’avenir… La vie dans l’Esprit Saint donné à ceux qui communiant au Christ, deviennent chaque fois des êtres renouvelés, la vie dans l’Esprit Saint qui est la vie chrétienne tout court, c’est précisément la vie d’hommes et de femmes qui sont tels que, en eux et par eux, dans leur quotidien vécu avec Dieu, Dieu peut faire du neuf dans l’histoire des hommes[1]. Amen.
[1]D’après Mgr Antoine Bloom la vie dans l’Esprit éditions des Syrtes 2024 p. 117-119