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Jour de Pâques

         Contrairement à ce qu’on pourrait attendre, la liturgie du jour de Pâques n’est pas très exubérante et triomphante ! Elle est empreinte d’une joie profonde mais contenue et discrète. L’Evangile ne montre pas le Christ terrassant ses adversaires et les chants grégoriens de ce jour sont d’une calme joie sereine L’Eglise respecte les volontés de son Epoux: la résurrection fut discrète, invisible aux hommes: « O nuit chante l’Exultet de la vigile, toi seule as pu connaître le moment où le Christ est sorti vivant du séjour des morts ». Jésus s’est fait reconnaître de ses disciples seulement... L’Eglise respecte les volontés de discrétion de son Seigneur et partage sa joie avec Lui intimement. Nous ne devons pas réfreiner notre joie, nous ne devons pas la taire; mais nous devons la mettre à l’unisson des sentiments du Christ.

 

         Mais justement, quels sont les sentiments du Christ ?

         L’Eglise répond à notre question en plaçant sur les lèvres du Christ au chant d’entrée de ce jour, un verset du psaume 138 :« Je suis ressuscité et  désormais, je suis toujours avec Toi. Ta main s’est posée sur moi, Ta sagesse est vraiment admirable ».

         Mais à qui Jésus parle-t-il ainsi ?

                  A son Père:  C’est la puissance du Père opérant par l’Esprit Saint, qui a ressuscité le Christ son Fils. Ainsi, il a introduit son humanité - avec son corps - dans la Trinité. Car l’ Incarnation ne cesse pas et c’est là sans doute l’inouï de ce que nous proclamons en ce jour: Le Fils de Dieu, la seconde personne de la Trinité  s’est incarnée et aujourd’hui, par la Résurrection, son corps glorieux est introduit dans la Ste Trinité. L’un d’entre nous est en Dieu ; par solidarité humaine et par charité divine, chacun de nous est en quelque sorte « caché en Dieu » comme dit St Paul dans l’épitre de ce jour. On comprend l’exclamation admirative du Fils au Père dans le verset du psaume  « Ta main puissante de résurrection s’est posée sur moi et Ta Sagesse est vraiment admirable! »

                  Mais ce verset du psaume a aussi des accents très personnels: « Je suis ressuscité » dit le Christ et dans cette affirmation au Père, nous lisons aussi la joie du Christ qui a opéré sa propre résurrection en vertu de sa puissance divine.A ses apôtres Jésus avait annoncé:  « j’ai le pouvoir de donner ma vie et de la reprendre »  ( Jn 10/17-18) Certes la mort de Jésus le Vendredi Saint a séparé son âme et son corps comme pour tout homme; mais la nature divine est restée unie aux deux qui étaient séparées et comme dit St Grégoire de Nysse,  « par la nature divine,... elles s’unissent à nouveau. Ainsi la mort se produit par la séparation du composé humain, et la Résurrection par l’union des deux parties séparées » (caté. 650).

         A l’admiration de son Père, le Christ ajoute la joie de sa victoire; la joie d’avoir mené à bien l’oeuvre confiée par le Père: par son incarnation, il a ressaisi toute l’humanité; par sa mort sur la Croix, il a libéré l’humanité du péché et par sa résurrection, il a ouvert à tout homme qui le confesse dans la foi, l’accès à la vie nouvelle et la communion parfaite en Dieu. Oui ! la Sagesse de Dieu est  vraiment admirable ! Admirable aussi le Fils qui l’a si parfaitement accomplie.

                  Mais ce verset du psaume a encore une autre dimension. Le Seigneur Jésus ne parle pas seulement à son Père: il parle aussi à son Eglise et à chacun d’entre nous ! « Je suis ressuscité et désormais, je suis toujours avec toi » Promesse magnifique: le Seigneur ressuscité est le compagnon merveilleux de chacun d’entre nous. Toute notre vie, nous pouvons la passer dans sa communion; chaque instant de notre existence est lourd de sa présence; malheureusement, nous oublions souvent cette sainte Présence !! Nous vivons comme si le Seigneur n’était pas notre compagnon quotidien.Le Frère Laurent de la Résurrection, un carme lorrain du XVIIè siècle, insistait beaucoup sur cette présence du Ressuscité dans la vie des croyants. Il invitait à nous rendre souvent présents à cette présence, écoutons-le: «  Nous devons pendant notre travail et autres actions, même pendant nos lectures et écritures, je dis plus, pendant même nos dévotions extérieures et prières vocales, cesser quelque petit moment, le plus souvent même que nous pourrons,pour adorer Dieu au fond de notre coeur, le goûter quoiqu’en passant et comme à la dérobée.... pour le louer, lui offrir votre coeur, le remercier. »

         Ces moments d’adoration intime et personnelle sont déjà contenus dans le verset: au Christ qui dit à chacun  «  Je suis ressuscité et désormais je suis toujours avec toi » le croyant répond avec toute l’Eglise: « Tu as posé ta main sur moi pour me sauver ! Ta sagesse est vraiment admirable! »

         Frères et soeurs, en matin lumineux de Pâques, Laissons éclater en nous une joie intime ! unissons-nous à la joie de la Trinité: s’il y a tant de joie au ciel pour un pécheur qui se repent, quelle doit être celle du retour du Fils dans son corps glorieux ! Mais cette joie nous demeure secrète. Ecoutons la douce parole du Maître qui assure  chacun  de sa présence et dans la paix, revenons au centre de notre être, là où le Maître habite désormais, pour le louer et l’aimer.         Amen!

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