Assomption 2020

Chers frères et sœurs, 

Nous voici une fois de plus à contempler avec joie la Résurrection de la Vierge Marie et son Assomption – sa montée, son entrée – dans le Royaume de Dieu dès le moment de sa mort. L'Assomption manifeste combien le ciel honore tout son être,  son corps et son âme au plus haut point. Nous nous unissons à la joie des Anges et des saints. 

 

Cet honneur rendu au corps et à l’âme de Marie n'est pas une invention gratuite. Elle est biblique et je désirerais vous montrer comment la mort de Moïse est une très belle clé ce lecture de la fête d’aujourd’hui. Cela nous fait voir comment Dieu a préparé tous les événements de notre foi avec minutie. Comme l’écrit un moine copte qui nous guidera dans notre lecture, « après le long entretien avec Dieu, au cours duquel Moïse avait reçu les commandements et toute la Loi, son visage rayonnait d'une telle lumière que les Israélites ne pouvaient le regarder en face. La lumière que reflétait son visage était une lumière divine, celle qui manifeste la présence de Dieu. Dieu était ainsi rendu visible sur le visage de Moïse, et c'est pourquoi le peuple pécheur ne pouvait regarder son visage, car le péché et Dieu ne peuvent se rencontrer face à face. Aussi Moïse portait-il un voile. »  Saint Paul méditant cet épisode de l’Ancien Testament écrit dans la 2^ème épitre aux Corinthiens 3/7-9 : «  Si le ministère … de la Loi gravée en lettres sur des pierres, avait déjà une telle gloire que les fils d’Israël ne pouvaient pas fixer le visage de Moïse à cause de la gloire, pourtant passagère, qui rayonnait de son visage. Combien plus grande alors sera la gloire du ministère de l’Esprit ! Le ministère qui entraînait la condamnation, celui de la Loi, était déjà rayonnant de gloire ; combien plus grande sera la gloire du ministère qui fait de nous des justes ! » En prenant appui sur ce texte, nous pouvons comprendre la Gloire qui rayonne sur le Corps de la Vierge Marie aujourd’hui en son Assomption : notre moine copte poursuit : « Si le visage de Moïse, alors qu'il avait reçu de simples paroles écrites par le doigt de Dieu, rayonnait pour manifester la gloire qu'avait revêtu son corps, combien plus grande la gloire qui a revêtu le corps de la Vierge alors qu'elle a reçu en son sein la Parole même de Dieu, la personne du Fils de Dieu, prenant chair de sa chair après la préparation opérée par l'Esprit Saint et alors que la puissance du Très-Haut la prenait entièrement sous son ombre, intérieurement et extérieurement. Quelle gloire a alors envahi le corps de la Vierge ! »,  elle qui a reçu la Lumière divine en son sein quand elle est venue s’incarner en elle. Nous pouvons encore aller plus loin : rappelez-vous ! Dieu a fait monter Moïse sur le mont Nébo pour lui montrer la terre promise dans laquelle le peuple guidé par Josué allait entrer tandis que lui, Moïse, n’allait pas y entrer mais mourir sur ce mont. Cela montrait que la terre promise n’était pas vraiment celle qu’il avait sous les yeux mais la communion avec Dieu dans laquelle il allait entrer par sa mort. 

Mais la Bible nous dit plus en Dt 34/5 : « Moïse, le serviteur du Seigneur, mourut là, au pays de Moab, selon la parole du Seigneur…que la tradition juive comprend ainsi « sur la bouche du Seigneur : c’est-à-dire dans un baiser »… cette traduction rappelant la création où Dieu avait rendu l’homme vivant par un baiser. La mort de Moïse est donc comprise comme une entrée dans la vie divine.

Et Dieu lui-même enterre Moïse sans dire où est son corps,  « loin de la vue de son peuple, de peur qu'ils ne s'égarent et n'en viennent à adorer son corps qui, semble-t-il, continuait à rayonner même après sa mort. » Si Dieu prend donc tant de soin et de délicatesse pour Moïse – la tradition juive pense que l’absence de tombeau peut aussi signifier que Moïse a été enlevé au Ciel comme Elie et Hénoch – si Dieu prend tant soin de Moïse, à fortiori prend il soin de Marie qui a porté son Fils en son sein  et la fait entrer dans la Terre Promise du Royaume aussitôt sa mort. « Ce corps de la Vierge avait connu l'habitation permanente de l'Esprit Saint, la plénitude de la grâce; la puissance du Très-Haut l'avait pris sous son ombre et la Parole de Dieu avait résidé pendant neuf mois dans ses entrailles ! » 

La connaissance de l’Assomption de Marie est une tradition secrète de l’Eglise… dans la continuation de la discrétion et du secret qui a entouré la mort de Moïse… sans doute pour la même raison : « de peur que la foi au Christ ne se dévoie, que l'humiliation de la croix ne soit éclipsée et que la vénération de la Vierge ne devienne un culte, une apothéose qui ne conviennent qu'à Dieu. Comme la mort de Moïse, celle de la Vierge devait être discrète.  D'autant plus que, lorsqu'elle est survenue, l'Évangile s'était répandu et on proclamait déjà que le Christ était le Fils de Dieu, Dieu en toute vérité, né de la Vierge Marie. C'est pour cette raison que ni les évangiles, ni les épîtres ne mentionnent la dormition de la Vierge et que - pendant les trois premiers siècles - l'assomption de son corps n'a été connue que par une tradition secrète. Il ne fallait pas qu'elle retienne exagérément l'attention et que le culte dû à Dieu s'en trouve dévoyé. » Enfin dernier trait : toutes les représentations de la Dormition de Marie sur les icônes, les vitraux ou sculptures du Moyen-Age montrent le Christ venant chercher le corps de sa mère qu’il tient dans ses bras à la fois comme un enfant emmailloté et comme un mort dans son linceul. Cette vision nous fait penser à Dieu s’occupant du corps mort de Moïse. Le corps de la Vierge, qui fut l’objet de l'attention du Père céleste depuis le moment de l'annonciation, n'a pas cessé d'être honoré – dans le secret comme pour le secret du Christ - jusqu'au moment où Dieu l'a pris dans la Gloire tandis qu'il était entouré d'honneurs par les anges. Amen.