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12ème dimanche de l'année A

« Ne craignez pas, » ; « soyez sans crainte » ; deux injonctions données par le Christ à ses disciples. Et si Jésus donne ses injonctions à ses disciples, ce n’était certainement pas pour rien. Mais pour mieux comprendre ce passage d’évangile d’aujourd’hui, il serait bon de connaitre le passage qui lie l’évangile de dimanche dernier où Jésus a envoyé les apôtres en mission et celui de ce jour. Car entre ces deux passages d’évangile, Jésus ne cache pas aux apôtres que la mission qu’il leur donne est périlleuse, risquée. Ecoutons quelques phrases qui précédent l’évangile de ce jour : « Voici que moi, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups… » (Mat 10,16), « Méfiez-vous des hommes : ils vous livreront aux tribunaux et vous flagelleront dans leurs synagogues. … » (Mat 10,17)) ; « Vous serez détestés de tous à cause de mon nom… » (Mat 10,19) et nous arrivons au texte de ce jour…

 

Les apôtres sont donc prévenus des risques de la mission et pourtant Jésus les invite à avoir l’audace de témoigner malgré tout et ceci sans crainte. Et pour les soutenir, malgré tout, le Christ leur démontre que seule la vérité gagnera, qu’elle est irrésistible et que rien n’arrête la Révélation : « Rien n’est voilé qui ne sera dévoilé, rien n’est caché qui ne sera connu. » (Mat 10, 26), en d’autres termes : « n’hésitez pas, je suis avec vous ». Il invite donc ses apôtres et par conséquence chacun de nous à ne pas craindre de proclamer notre foi en la Bonne Nouvelle libératrice qu’Il est venu nous apporter « Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. » (Mat 10,27).

Les merveilles de Dieu sont incommensurables mais peu de personnes veulent les entendre car la révélation de toutes les beautés de l’amour de Dieu vient trop souvent se heurter aussi aux noirceurs du mal. Et cela est malheureusement toujours d’actualité 2000 ans après la venue de notre Sauveur… ! On pourrait croire que les évangiles ont été écrits aujourd’hui pour notre génération de chrétiens du vingt et unième siècle et plus particulièrement pour notre Eglise de France… Mais les noirceurs de ce monde, noirceur qui existent depuis toujours, ne doivent pas nous faire craindre de réaliser notre mission de chrétiens et de proclamer, jusque « sur les toits », la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu, malgré les risques encourus. Et, malgré ces risques, le Christ nous dit de ne pas craindre. En effet, mieux vaut sauver nos âmes en proclamant les merveilles de Dieu que de les perdre en nous laissant tenter et aveugler par le monde. Mieux vaut ne pas plaire à tout le monde, ou plutôt au monde, que de se laisser bâillonner par les choses de ce monde.

Et cela nous ramène à Jérémie qui, lui, a payé les fruits de l’annonce de la Parole de Dieu. Il a été un très grand prophète, mais c’est seulement après sa mort que l’on s’en est aperçu. De son vivant, sa parole a été dérangeante. Sa mission était de dire aux rois et à toutes les autorités politiques et religieuses leurs quatre vérités, des vérités pas toujours bonnes à entendre : Le peuple élu a oublié son Dieu, il s’expose à des catastrophes. Jérémie n’a cependant pas fléchi. Il a confié sa cause au Seigneur et a accompli sa volonté. « L’amour de ta maison m’a perdu » chante le Ps 68 de ce jour, et ce verset pourrait résumer la vie de Jérémie. Mais rien ne l’a arrêté. Il a connu des moments de découragement, comme tous les prophètes, mais il sait déjà que l’amour de Dieu sera plus fort que tout, et parviendra un jour à supprimer tout mal de la terre : c’est ce qu’il appelle, dans l’extrait que nous avons entendu : « la revanche de Dieu ». Revanche personnifiée par le Christ vrai Dieu et vrai homme.

Quant à Paul, en comparant Adam et le Christ, ou plutôt en opposant Adam au Christ, il n’oppose pas deux personnes, mais deux comportements. Le comportement à la manière d’Adam qui conduit à la mort spirituelle et le comportement à la manière du Christ qui conduit à la vie éternelle. Adam représente l’humanité qui cherche sa vie ailleurs qu’en Dieu et qui fait fausse route. Au lieu de faire confiance à Dieu, l’homme cherche à saisir les attributs de Dieu, mais il fait fausse route se coupant de lui-même de la relation vitale qu’il devrait entretenir avec Dieu.

Encore une fois, remarquons, chers frères et sœurs combien ces textes nous renvoient dans notre temps et vers nos responsabilités de chrétiens.

J’ai lu récemment que, alors que l’immense majorité des Français était baptisée (90%) et catéchisée jusqu’au début des années 1960. Malheureusement, nous nous en doutons bien, les catholiques « pratiquants », au sens large du terme ne formeront plus, à l’avenir, qu’une petite minorité, si nous n’agissons pas. En 2023, 8 % des 18-59 ans se rattache à cette catégorie et les « sans religion » sont en forte progression dans tous les pays du monde. « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux » (Luc 10, 1-9). Mais si nous sommes ici aujourd’hui, c’est que nous sommes de ces ouvriers dont le Seigneur a besoin. Et, nous devons agir chers frères et sœurs et nous prononcer, « sans crainte », devant les hommes. Nous devons nous déclarer publiquement et en actes, solidaires du Christ ; ne faire qu’un avec Lui, avec tout son amour et sa douceur, mais aussi avec sa fermeté. Pour cela nous ne devons jamais oublier de confier nos actions à l’Esprit Saint qui seul peut nous guider sur les bons chemins.

Si nous aimons notre humanité, nous devons annoncer Dieu. Si nous voulons protéger la vie qui nous habite, qui habite nos frères en humanité, nous devons annoncer Dieu, Si nous aimons la création et voulons la protéger, nous devons annoncer Dieu. Si nous aimons nos enfants, nos petits-enfants, nos amis, notre prochain nous devons annoncer Dieu…

Nous devons l’annoncer « sans crainte », mais en prêtant une attention toute particulière à ne pas nous laisser tenter par celui qui « peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps. » (Mat 10,28). Le malin est toujours là pour nous tenter avec ses leurres et ses séductions.

Alors, chers frères et sœurs, déclarons-nous pour le Christ devant les hommes. C’est la condition de notre vie éternelle. Il ne s’agit pas d’un calcul mais d’une relation d’amour : par notre baptême, nous avons été « greffés au Christ » (Rom 6,5), nous sommes inséparables de Lui. Oserions-nous dire du mal ou abandonner une personne que l’on aime vraiment ?

Mais Dieu, dans son grand amour pour chacun de nous, ne nous impose rien, il nous laisse la liberté de le renier, il nous laisse libre de nous éloigner de Lui et de dire comme saint Pierre au moment de l’arrestation : « Je ne connais pas cet homme » (Mat 26,72).

Mais nous savons bien que celui qui s’éloigne à la manière du fils prodigue ou de Pierre peut toujours revenir ; et, comme Pierre, le Christ lui dira simplement : « M’aimes-tu ? » (Jn 21,15).

Amen.

Jean-Marie Blondel

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