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Messe de la nuit de Noël 2023

Ce soir, nous sommes réunis, comme une famille, autour d’un enfant qui vient de naître. Les circonstances de la naissance sont touchantes : le jeune couple vient d’arriver après un long voyage, il est au milieu des siens et voilà que le moment d’accoucher est venu : on pare au plus pressé, on installe la jeune maman dans la pièce la plus chaude, à l’écart, dans la maison : l’étable qui est dans la grotte de pierre à laquelle la maison est adossée. Les femmes s’affairent... les hommes de leur côté sont un peu tendus, surtout le papa. Et puis l’enfant est là ! La joie est totale et partagée par tous, surtout en ce temps où l’enfant ne fait pas peur puisqu’il est toujours vu comme une bénédiction de Dieu. De ce fait merveilleux d’une naissance, nous nous réjouissons aussi encore ce soir. Mais est-ce vraiment Noël ? C’est le fait, objectif, visible. Mais est-ce tout ? Dans la vie d’un être humain, peut-on se contenter seulement du visible? Si oui, quel rétrécissement de la réalité !

 Pour bien de nos contemporains français, semble-t-il, oui, on peut ! Tout semble dire autour de nous, dans les média, à l’école : « renonce à la soif spirituelle ! Renie-la, alors tu seras rassasié et heureux. » Alors oui, Noël n’est qu’une Fête de famille, la fête des enfants, au cœur de l’hiver, des cadeaux ... et cela suffit. 

Pour les deux milliards de chrétiens, ce n’est qu’un aspect de Noël. Le véritable sens de Noël est comme caché, il est invisible. Il faut se mettre en marche pour le découvrir, chercher. Il faut pressentir que cette naissance est sans doute plus qu’une simple naissance. Marie et Joseph savent eux ; bientôt les bergers qui vont arriver, le savent également ... et ils le disent ! Et leur présence va étonner la famille et sans doute l’intriguer ! 

Mais que faut-il donc pour découvrir ce secret ? Il faut la foi. 

C’est la porte pour entrer dans le monde de Dieu, pour découvrir la présence et l’œuvre de Dieu dans les réalités humaines, même les plus humbles. La porte n’est pas l’innocence, elle n’est pas la pratique des commandements ou des vertus... qui pourrait entrer ? La porte, c’est la foi. Crois et tu pourras entrer ; crois, fais confiance en Dieu, et tu pourras entrer ; sois assez humble pour entrer dans la confiance en Dieu tel que la Parole de Dieu nous le dit, comme tant de croyants le font de part le monde et dans l’histoire... et tu pourras entrer. 

La foi, c’est un coup d’audace. Non pas mépris de l’intelligence, mais découverte et acceptation de ses limites, acte de confiance en Dieu, simplement. La foi, c’est un émerveillement devant ce que Dieu dit et fait, c’est simplement « dire oui » à Dieu. Et cela librement. « Dieu a créé la liberté pour rendre possible la foi...et afin de rendre possible la foi, il a couru même le risque du péché. »1 

« On ne finit pas de s’étonner devant cette grande invention de Dieu qu’est la foi.»2. Quand nous avons fait le pas, alors notre vie s’éclaire tout à coup et progressivement ; notre vie devient tout à coup profonde puisque Dieu la fait avec nous ; notre vie acquiert sa vérité puisque désormais, je vis et que je sais que je vis grâce à Dieu, avec Lui, en Lui et pour Lui. 

Marie qui a cru à la Parole de Dieu, sait que son enfant qui vient de naître est le Messie attendu par le peuple de Dieu. Marie a accepté d’en être la mère malgré les circonstances rocambolesques de cette naissance d’un enfant qui sera « Emmanuel » c’est-à-dire Dieu avec les hommes. 

Joseph a accepté le bouleversement que ce fait apporte à son mariage ! Tous deux vont avoir à élever ce petit garçon qui homme et fils de Dieu... Le Messie qui fera la paix entre Dieu et les hommes, entre les hommes et Dieu. Et pourtant, à Marie et à Joseph, Dieu a demandé l’impossible, le bouleversement complet de leur projet ; à tous deux il a demandé un saut dans l’inconnu ! 

Les bergers ont appris eux aussi, une partie du secret : « je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. » Et leur foi les a fait se rendre à l’endroit indiqué ! Et là, le signe annoncé se vérifie : « vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » 

Voilà donc le coup d’audace de la foi ... et peut-être n’y-a-t-il pas à s’étonner que si peu le fasse ! Il faut avoir une telle liberté avec ses projets et avec soi-même, il faut aimer prendre le risque, il faut être capable de faire confiance. 

Voilà le coup d’audace de la foi que Dieu donne à chaque homme la possibilité de le faire. Car la foi est un don de Dieu fait à l’homme pour que l’homme puisse entrer dans le merveilleux dessein du Père : pour le recevoir, il suffit de lâcher prise, de ne plus s’agripper à sa raison pour s’expliquer toute chose, de ne plus avoir peur de ce que les autres penseront de moi, prendre le temps et la bonne attitude pour découvrir peu à peu le secret intérieur des êtres et des choses. 

Cette foi, loin de déshumaniser, humanise davantage : les saints qui sont les seuls croyants accomplis – les saints, ceux reconnus par l’Eglise et tous les saints anonymes qui ont été de bons disciples du Seigneur dans le secret, - les saints attestent de la beauté de l’humanité accomplie en Dieu, la même humanité que la nôtre devenue belle après la haute « valeur-ajoutée » de la foi ! 

L’éloignement voulu de la foi, dans notre pays, fait aussi apparaître l’appauvrissement qui en résulte, l’irrespect de la vie, le vide de l’existence qui fait tant peur, le besoin de compenser - pour survivre - par la consommation de médicaments, la montée de la violence du vocabulaire et des gestes. 

Nous le savons : tout choix humain a des conséquences, car Dieu nous prend au sérieux et Il nous a laissés comme dit la Bible « au gouvernement de nous-mêmes ». 

Ce soir, regroupons-nous autour de la famille et des amis bergers de Jésus : partageons leur joie humaine, leur joie spirituelle qui leur fait accueillir en Jésus le Sauveur promis, le Fils de Dieu avec l’humanité comme jamais puisqu’il est l’un d’eux... et le plus fragile, un enfant nourrisson. Dans la foi, recevons avec gratitude le cadeau si précieux et inattendu de Dieu. « L’essentiel est de ne pas trahir la soif spirituelle qui nous est donnée mais surtout d’ouvrir les yeux et les oreilles à ce ruissellement de lumière, d’amour, de beauté qui, éternellement, se déverse sur nous. Oui comme le chante la liturgie : « Ta nativité ô Christ, notre Dieu, a fait resplendir dans le monde la Lumière de la Connaissance. »3 

Amen. 

1 Cardinal Cantalamessa La vie dans la Seigneurie du Christ p. 45
2 idem p. 45 
3 Père Alexandre Schmemann Vous tous qui avez soif 2005 p. 13 et p. 129

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