Lettre aux paroissiens
Supplément Décembre 2013 Noël
Chers paroissiens,
Dans les semaines qui nous séparent de Noël vous allez sans doute accomplir quelques gestes typiques de ce temps préparatoire à Noël : confection du sapin, de la crèche, décoration de la maison. Nous accomplissons ces « rites » avec joie et enthousiasme, surtout les enfants. Ces rites ont une histoire, ils s’enracinent dans notre foi… mais nous avons souvent oublié leur sens profond. Ce supplément se propose de « rafraîchir » notre mémoire pour mieux encore vivre tous ces préparatifs de Noël.
LE SENS PROFONDEMENT CHRETIEN DU SAPIN.
« Le sapin provient des jeux des mystères du Moyen Age qui dans la nuit sainte, en ouverture à la fête de Noël, et devant le portail des églises, représentaient l’histoire de la chute au paradis. »
Le premier sapin remonterait à saint Colomban qui fonde en 590 le monastère de Luxeuil au pied des Vosges. Un soir de Noël, il emmène avec lui quelques-uns de ses religieux jusqu’au sommet de la montagne où préside un antique sapin, objet de culte païen. Les moines accrochent à l’arbre leurs lanternes et leurs torches et dessinent une croix lumineuse au sommet. Cela permet à saint Colomban de raconter les merveilles de la naissance de Jésus aux paysans accourus voir ce spectacle et d'en convertir plusieurs, lançant la coutume d’installer chaque année des sapins illuminés. Cependant aucune tradition écrite ne relate cette histoire.
Retrouvons notre Moyen Âge et ses mystères : cela se déroulait le 24 décembre, on représentait des scènes du paradis. La région d’origine de ces jeux, semble être la région du Rhin et en particulier Strasbourg.
Y paraissaient Adam, Eve, le diable, le chérubin et l’arbre : on utilisa un sapin toujours vert à Noël et on y accrocha quelques pommes. Dans la nuit de Noël, le péché de l’homme a été effacé par l’ incarnation du Christ qui nous rouvre le paradis. Comme le chante un vieux Noël allemand : « Aujourd‘hui il rouvre l’huis/qui mène au beau paradis/ Le chérubin n’en défend plus l’accès/ A Dieu louange, honneur et majesté. »
A partir du XVIIè siècle (1ère attestation en 1600 à Sélestat), on suspendit aussi, à côté des pommes, une ou des hosties : le remède à côté du mal, la pomme conduisit à la mort, l’hostie à la Vie, l’hostie comme voie de connaissance de Dieu par communion avec Lui. Vers la même période, les sapins émigrèrent des églises aux maisons des corporations puis bien vite aux habitations particulières. On note dans un Journal de 1605 à Strasbourg : « A Noël, à Strasbourg, on dresse des sapins dans les salons. On y accroche des roses découpées dans du papier multicolore (ndrl : la rose est la fleur de l’arbre de Jessé d’Isaïe 11.1), des pommes, des hosties, de l’or qui grésille, du sucre… »
Les dernières arrivées furent les bougies dans le sapin : elles vinrent avec la Princesse Palatine, épouse du frère de Louis XIV, qui se souvenait les avoir vues à Hanovre dans son enfance vers 1660. On voulait ainsi faire aussi du sapin l’arbre de Lumière, évoquant la Lumière du Christ brillant dans les ténèbres. Au même moment, on trouva incorrect de mettre des hosties : on les remplaça par des petits sablés ronds… que nous connaissons encore aujourd’hui!!
Enfin, lorsque dans les verreries de Meisenthal en Lorraine comme en Thuringe, on sut fabriquer des boules en verre de toute couleur, elles remplacèrent abondamment les pommes fruits sur l’arbre… et la fréquence des incendies modéra un peu l’usage des bougies !
Le « sapin de Noël » né dans la vallée du Rhin, se répandit rapidement en Allemagne, en Lorraine et en Alsace. C’est au XIXè qu’il gagna l’Angleterre par le prince Albert de Saxe-Cobourg époux de la reine Victoria.
LES BRANCHAGES DANS LES MAISONS.
C’est une coutume très ancienne – d’origine païenne de suspendre dans les maisons au moment du solstice d’hiver - des branchages de sapins, de houx et de gui. Au IVè siècle, St Ephrem de Syrie rapporte cette coutume adoptée par les chrétiens !... et passée en Occident. La naissance du Christ touche toute la création, -pas seulement l’homme -, et la renouvelle complètement.
Nous devons la coutume de la crèche à St François d'Assise qui a réalisée en 1223, une des premières crèches vivantes, en utilisant des personnages réels, à Greccio, en Italie, dans une grotte de la région où les frères mineurs avaient établi un ermitage. Les personnages (Joseph, la Vierge Marie, les mages, les bergers, les paysans) étaient joués par les gens du village. Les animaux aussi étaient réels. Thomas de Celano, premier biographe de François, rapporte que François qui était diacre, prêcha, durant la messe de Noël, et que l'un des assistants le vit se pencher vers la crèche et prendre l’enfant dans ses bras. À Greccio se trouve encore un ermitage franciscain qui commémore cette première crèche vivante. Petit à petit, la coutume s'est répandue, sous l'influence des prédicateurs franciscains d’abord en Italie, puis à Prague (XVIè) en France (fin XVIIIè), en Lorraine, en Europe : la Provence développa beaucoup la spiritualité de la crèche, à partir du XIXè siècle comme dans nos régions.
Un livre :Oscar CULLMANN (exégète bâlois) « la nativité et l’arbre de Noël » Cerf 1992