« L’ange du Seigneur se présenta devant les bergers et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa Lumière.
Alors l’ange leur dit :
« Ne craignez pas car voici que je vous annonce une bonne nouvelle
qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David,
vous est né un Sauveur
qui est le Christ, le Seigneur.
Et voici le signe qui vous est donné :
vous trouverez un nouveau-né
emmailloté et couché dans une mangeoire. »
Voilà ce que nous venons d’entendre !
Voilà ce que avez sous les yeux, derrière moi :
« La lumière du Ciel visite la terre en Palestine, elle descend jusqu’à nous ce soir »
Les Anges sont là, eux qui accompagnent toujours la manifestation de Dieu
Et pourtant quelle discrétion ! Le mystère est dit en une phrase « vous trouverez un nouveau-né
emmailloté et couché dans une mangeoire. » St Luc se contente de rapporter les faits que la crèche de notre paroisse montre.
St Jean dans l’Evangile de demain, en donnera le sens : « Et le Verbe la Parole de Dieu s’est fait chair. Il a dressé sa tente parmi nous ».
Ce récit très simple est plein d’instruction.
Nous le méditerons sous la conduite de St Jean l’Apôtre.
St Jean dit nous dit qu’en ce bébé, c’est Dieu qui a pris chair, qui a assumé la nature humaine. On dit souvent : Dieu s’est fait homme… mais c’est ambigu car le mot est abstrait et imprécis. Non ! Dieu s’est fait HOMME JUIF
La « chair » dont parle St Jean, c’est l’homme très concret, né sur une terre, parlant une langue, dans une culture, une histoire, un enracinement… Même si cette nature humaine est la même pour tous les hommes – donc universelle - ils la déclinent selon les modalités les plus variées. Et d’une manière toujours particulière. Depuis Babel, on sait que Dieu aime la variété. Et pour être universel, il faut être enraciné et vivre la nature humaine universelle de l’intérieur, dans le particularisme INEFFAÇABLE, de son enracinement concret.
Et en laissant subsister le peuple d’Israël, Dieu sans doute a voulu que nous n’oublions jamais CE PARTICULARISME DE L’INCARNATION, nous qui avons tellement la tentation de l’abstrait, surtout aujourd’hui : être de partout, - de Paris à Tokyo en passant par New York, voilà le fin du fin de l’abstrait intelligent, moderne, l’avenir quoi ! - – de partout et en fait, de nulle part. En fait artificiel, évanescent et dangereux.
Saint Jean poursuit pour évoquer la vie de Jésus « Il a dressé sa tente parmi nous »
Dieu l’Eternel, le Tout Autre, Celui que personne ne peut connaître est donc entré dans le temps, dans la fragilité du temps, dans le peu de temps d’une vie que cette belle expression - « il a dressé sa tente » - veut suggérer. Il a vécu la brièveté d’une vie comme la nôtre. On ne campe pas durablement… c’est en allant vers quelque part qu’on campe, provisoirement. Même s’il est heureux et bon d’être sur terre – et Dieu y est venu avec nous – on n’y est qu’en passant. Et c’est une erreur grave d’y vivre comme si ce n’était pas en passant justement. La fragilité du campement de Jésus ce soir dans l’étable de l’arrière maison de la famille de Bethléem nous dit tout de suite que nous sommes en voyage sur cette terre, de passage…
Mais alors de passage, mais alors, venant d’où ? Et allant vers où ?
Venant d’où ? Depuis l’appel d’Abraham, voici 4000 ans à peu près, la Bible nous dit que nous sommes dans le désir et l’amour de Dieu, depuis toujours. Il aime chaque homme, désire son existence, lui confie une mission pour son bonheur et le bonheur des autres. Chacun a une place unique dans l’humanité : nous venons de Dieu : « Il nous a aimés dans le Christ dès avant la fondation du monde » écrit St Paul.
Depuis l’appel d’Abraham, nous savons que Dieu n’impose rien à l’homme, il l’appelle et l’invite librement à répondre à son appel. C’est la grande imprudence divine : laisser l’homme libre de servir Dieu. Abraham est modèle de foi car il répondu « oui »…et s‘est lancé dans l’aventure avec Dieu … comme 2000 après lui, le fera la Vierge Marie à qui Dieu proposait cette chose inouïe : donner au Verbe divin, la chair d’une nature humaine, ce qui est réalisée ce soir ! Sous nos yeux. C’est pour cela qu’on fait une crèche, pour VOIR.
Oui, chacun de nous reçoit un appel et tout le monde est indispensable dans la vision divine.
Vers où allons-nous ? « à tous ceux qui l’ont reçu, écrit encore Saint Jean il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient. Ils ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu. »
Appelés à accueillir Dieu pour devenir son enfant, enfant de Dieu, en communion avec Dieu, participant à sa nature divine. Dès maintenant et en plénitude dans la vie éternelle. Tous « Tous nous avons eu part à sa plénitude, nous avons reçu grâce après grâce. » écrit encore Saint Jean.
Cela ne sert à rien de fêter Noël si ce soir Jésus ne naît pas davantage dans le cœur de chacun d’entre nous, c’est-à-dire si ne se produit pas en nous l’admirable échange que nous venons de chanter : Le Seigneur Jésus a pris notre nature humaine mortelle et fragile pour nous donner part à la nature divine, éternelle et nous entrainer par son Esprit dans l’amitié et la communion avec le Père. « Par un échange admirable, le Verbe a pris chair de Marie et il nous rend participant de sa divinité par la puissance de l’Esprit Alleluia. »
Mais comment savoir que ce merveilleux échange se produit en nous ?
Je ne retiendrai que deux réponses pour ce soir :
- la première : si je pense ma vie et si je la vis de plus en plus, comme venant de Dieu, campant sur cette terre avant de retourner à Dieu pour l’éternité. Cela donne beaucoup de joie, cela libère du matérialisme destructeur de l’âme et de la société, de la cupidité et de l’attachement désordonné aux biens de ce monde. Cela met le cœur en paix.
- la seconde : si j’imite les bergers dans leur foi et leur émerveillement : car les deux – foi et émerveillement – vont ensemble ! Vous êtes là ce soir parce que vous savez qu’un événement important se produit. Vivez vraiment la fête, sans crainte, sans arrière-pensée, ce n’est pas un conte de fée pour enfant… C’est la Vérité divine pour chacun d’entre nous, il en va de notre destinée éternelle de communion avec Dieu. Ne faisons pas la fine bouche ou les désabusés qui ont tout vu ! Emerveillons-nous vraiment.
Amen.